Madère

Madère étonne par ses contrastes. Cette île, perdue dans l’Atlantique, est un paradoxe naturel : éden végétal formé de forêts subtropicales et rivages volcaniques. La végétation luxuriante du centre contraste avec la pointe aride et quasi-désertique de l’est. Forêts primaires – classées au patrimoine de l’Unesco - se disputent un territoire encore sauvage. Sans doute faut-il se rappeler que Madère est née d’un cataclysme volcanique. Cette île verdoyante ne montre que le quart supérieur de sa base volcanique qui plonge à 4000m de profondeur.

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Même si nous ne doutions pas de l’existence de micro-climat (nous sommes bretons d’adoption !), toute la réalité du concept est démontrée sur cette île : au centre, les montagnes abruptes arrêtent les nuages de l’Atlantique et contraignent l’air humide et chaud à s’élever et à se condenser en précipitations. Il en résulte notamment des versants entiers de cultures en terrasses.

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Mais à l’est, la faible altitude fait glisser les nuages, la terre est aride, presque désertique.

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Nous commençons notre découverte de l’île avec l’équipage de Catapulte. Première étape : les levadas, au centre de l’île entre Ribeiro Frio et Balcoes. Ces canaux d’irrigation serpentent l’île et permettent aux sources de montagne du Nord de rejoindre les champs en terrasse du Sud. Un réseau de 1600km de levadas, construits majoritairement par des bagnards et des esclaves au 15ème et 16ème siècle, sillonnent l’île. Les sentiers qui les longent pénètrent le cœur montagnard. Nous avons quitté la Marina, située en milieu aride, en débardeurs sous un soleil de plomb et quelques 30 km plus tard, on se retrouve au centre de l’île à 800m d’altitude dans le brouillard et le crachin « breton » en coupe-vent et K-Ways.

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La végétation y est incroyablement verdoyante. Les murs végétaux suintent d’humidité, les pins côtoient les eucalyptus qui dégagent un subtile parfum. Plus nous avançons dans la forêt, plus l’humidité est palpable et le brouillard rend certaines scènes assez surréalistes.
Les 5 filles organisent des courses de bateau et de feuilles dans les levadas tandis que les parents planifient la prochaine traversée et commentent les fichiers météo recueillis le matin-même.

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Le lendemain, cap sur Funchal, la capitale de Madère. Grosse déception car nous arrivons au Marché de Lavradores alors qu’il ferme ses portes… On se console à la Quinta das Cruzes (la quinta est une maison de maître rayonnant sur un vaste domaine agricole). En l’occurrence, il s’agit de celle de l’ancien gouverneur de l’île, reconstruite au 18ème siècle pour une riche famille de l'île. Camille et Manon s’extasient devant la chambre de Madame, son nécessaire à couture et cette drôle de chaise sculptée : « c’est quoi cette chaise avec un couvercle ? …. » demande Camille. Et Manon de répliquer à sa sœur : « A ton avis, à quoi une chaise avec un trou peut-elle bien servir ?... ». Camille découvre hilare un pot de chambre du siècle dernier et nous demande où se trouve la chasse d’eau.
On enchaine la Casa Museu Frederico de Freitas, qui abrite un petit musée sur l’Azulejos et la Casa Calçada qui – outre sa bibliothèque bureau superbe - abrite notamment un charmant patio. On longe le couvent Santa Clara et l’on rejoint l’équipage de Catapulte pour une virée dans la « Zona Velha », la vieille ville. Nous élisons domicile pour la soirée dans la très colorée rua Santa Maria, dont les portes peintes par des artistes font le bonheur de nos objectifs avec Muriel tandis que les Hommes nous attendent à la terrasse d’un pittoresque bar à cocktails (le patron est champion de cocktails de Madère) où nous sirotons quelques breuvages. L'ambiance est conviviale, amicale, il fait bon vivre à Funchal.

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Le lendemain, on entreprend de parcourir l’île en voiture avec Murielle, Eric et leurs filles : les montagnes succèdent aux landes, les grottes aux cascades, les cultures en terrasse aux plages de sable gris. Escales à Santana pour ses maisons colorées au toit de chaume, à Sao Vincente pour ses grottes volcaniques, à Porto Moniz pour ses piscines "naturelles", sans oublier la route de la côte d'or, suspendue à flanc de falaise. C'est là que nous élirons domicile pour notre premier "drony" (voir vidéo de Jules).

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Autre spécificité de Madère : rien n’est jamais franchement ni tout à fait droit, à part la piste de l’aéroport qui surplombe majestueusement la mer et nous aurait presque fait regretter de ne pas être arrivés par les airs.

On serait bien resté encore quelques jours à Madère mais une zone de grand calme puis une dépression se profilent et nous avons rendez-vous avec Maman à Lanzarote dans quelques jours. Il est donc temps de reprendre la mer et de dire au revoir à l’équipage de Catapulte que nous retrouverons très vite aux Canaries. Une fois encore, nous ne coupons pas au départ anticipé. Flexibilité et réactivité, nos capacités d'adaptation sont mises à rude épreuve.

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Madère vue du ciel

Madère from Jules et So on Vimeo.

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Quinta do Lorde - Madère

La marina de Funchal n'a que très peu de place pour accueillir les voyageurs, donc nous nous sommes arrêtés à la récente marina Quinta do Lorde.
Située à l'extrémité Est de l'île, elle est très excentrée et il faudra prendre un bus ou un taxi pour sortir de ce complexe qui ressemble un peu à un village Disney avec ses façades colorées toutes neuves (et quasi personne dans les rues!). Le cadre est malgré tout impressionnant avec le pontons au bord des falaises.
L'accueil est vraiment excellent et il y règne une bonne ambiance. Pas besoin de pontons sécurisés, c'est tout le complexe qui est fermé par des grilles (mais quel réel intérêt?).

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Même sans vent et sans grosse houle, les bateaux bougent beaucoup dans le port et les pontons ne semblent pas non plus d'une solidité à toute épreuve. Certains étaient d'ailleurs passés sous des bateaux lors d'un gros coup de vent de Sud il y a quelques années. Personnellement, j'hésiterais à y laisser mon bateau pour une longue durée.

Supérette et restaurant sur le quai. Wifi correct. Grand supermarché à Machico (10mn de voiture).
Magique: en arrivant, je demande s'il y a un mécano agréé Yanmar pour faire la révision de mes moteurs. 2h après, un représentant était à bord et dans un français parfait me propose de venir le lendemain. Travail très pro (il est ingénieur!) et pour beaucoup moins cher qu'en France… (Marc Herminio +351 962 370 315)

J'ai pu aussi faire 2 belles plongées (avec 25m de visibilité) avec le club présent sur le complexe. Pas mal de poissons sans que ce soit exceptionnel. La veille de notre arrivée, un phoque était venu jouer avec eux par 20m de fond!

Location de voiture bon marché depuis la réception de la marina.
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Petite navigation vers l'île de Madère

Porto Santo étant relativement plate, les nuages ne s'accrochent pas à l'île et celle-ci bénéficie donc d'un climat beaucoup plus sec que l'île principale de Madère. Une zone orageuse étant prévue sur la zone, nous sommes restés sur cette île un peu plus longtemps que prévu, pour contempler, de loin, les éclairs sur Madère.
Une fois le beau temps revenu, il était temps de mettre les voiles pour aller randonner sur Madère.
Traversée courte (30 milles, soit 55km) très agréable en compagnie de Catapulte et Séquoia avec une météo très clémente: 10/12 nds, avec un angle de 140°, le tout avec une houle très légère.

Merci à Eric pour la photo.

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A voir à Porto Santo

Porto Santo, située dans l'Archipel de Madère, est donc notre point de chute après 4 jour de nav'. C'est aussi notre lieu de rendez-vous avec l'équipage de Catapulte.
Située à 30 miles de sa grande soeur Madere, Porto Santo est beaucoup plus aride et se targue auprès de son ainée de posséder une plage de sable. Au 15ème siècle, espagnols et portugais y récoltaient le "sang du dragon", teinture pourpre tirée de la résine du dragonnier des Canaries. C'est d'ailleurs à cette époque que Christophe Colomb débarque sur Porto Santo en tant que navigateur marchand. Il y aurait rencontré sa femme, fille du Gouverneur de l'île, et ils auraient vécu à Vila Baleira une à deux années avant que Colomb ne parte à la découverte des Indes. C'est ici que se seraient dessinés ses projets d'exploration du nouveau monde.
Porto Santo est donc aujourd'hui encore le fief de Colomb et même si la Casa Colombo ne présente que peu d'archives - et assez peu d'intérêt - la manne est trop belle pour tomber dans les oubliettes. A Vila Baleira, chaque année est organisé le festival Colombo - fête où les villageois festoient en costume sur fond de reconstitution de navires, acrobates, parades et cracheurs de feu.
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C'est avec Muriel et Eric et leurs filles, équipage de Catapulte, que nous avons assisté aux festivités. Le mouillage à deux bateau-copains, c'est vraiment sympa. On expérimente les ploufs collectifs, les longueurs de nage entre les deux bateaux, les enfants qui s'appellent à la VHF (nous rentrons dans une nouvelle ère : celle où la VHF a détrôné le portable !!), les débriefings techniques des Papas, les débriefings Cned des Mamans… Même les avitaillements en annexe ont des airs de colonies de vacances.
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Comme aux Açores, la digue de la marina de Vila Baleira est couverte de peintures de navigateurs ayant fait escale ici. Nous nous serions bien prêtés à l'exercice de "marina art" mais notre peinture à l'eau aurait fait triste mine. NB : prévoir de la peinture acrylique pour les Açores.
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Porto Santo, c'est aussi l'occasion pour les deux équipages de s'entrainer aux premières randonnées. Excursions en taxi fangio dans le Nord de l'ile à la Rocha do Gasparao.
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Et sur les conseils de Tiphaine et Jean-Baptiste de Séquoïa, autre voilier français rencontré au mouillage, belle rando entre Pico de Castelo et Pico do Facho.
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Porto Santo - Le mouillage

Porto Santo bénéficie d'un mouillage sûr par vent établi de NE à O (par le le N). Le fond est recouvert de sable et permet de bien encaisser les rafales qui peuvent dévaler des collines toutes proches. Par vent de NE, il vaut mieux mouiller tout prêt du port pour bien s'abriter du vent, mais par vent de NO, c'est plus sympa et plus pratique de mouiller devant le village. Par vent et houle de E/NE, comptez aussi sur un roulis capable de bien vous malmener.

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La visibilité sous l'eau est excellente et l'eau d'un bleu-vert des plus agréables. Aucun souci pour discerner son ancre par 10m de fond. Venant des rias de Galice et des ports portugais, cela faisait bien longtemps que l'on n'avait pas vu les dessous de Seaview. Nous serons bons pour une grande séance de grattage des coques.

Le débarquement en annexe est possible sur le ponton fixe du village, mais par vent de NE, il vaut mieux préférer le port qui n'est qu'à 15/20mn à pied des commerces (ou à 5€ en taxi avec les courses!). Supermarché à 50mètres de la plage.

Assez inhabituel: le mouillage le long de cette plage fait partie d'une zone réglementée. Il faut donc se présenter à la marina pour s'acquitter de quelques euros. Je ne suis pas sûr qu'il y ait quelqu'un pour contrôler… Par contre, la police veille à la bonne déclaration du bateau et de l'équipage aux douanes. Cela prend 10mn avec un douanier sympathique qui cherche à apprendre quelques mots de français :)

Vue du mouillage par le NE au petit matin (Catapulte et nous), près du port.

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Traversée de Cascais à l'archipel de Madère vue par Sophie

Nous devenons coutumiers des départs anticipés pour cause de dépression. Notre départ, initialement prévu pour samedi soir ou dimanche matin, est finalement avancé à samedi matin du port de Cascais. On avance à 6-7 noeuds sous GV (Grand Voile) et gennaker Une heure après le départ, les dauphins nous escortent en masse, ils sont une quinzaine à jouer de part et d'autre de Seaview pour le bonheur des petits et des grands.
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Dans l'après-midi, le vent forcit à 15 noeuds, le soleil donne, la houle s'est allongée et Seaview surfe les vagues. Jules, qui a assuré les heures du matin, récupère dans le cockpit; les filles écoutent de la musique allongées dans le carré. A la barre, je me dis que cette nav' commence vraiment bien.
Progressivement, les rafales se font plus fortes et de plus en plus rapprochées. Anxieuse, je scrute le point d'amure du gennaker, le bout-dehors et la sous-barbe - celle qui a lâché dix jours auparavant - lorsqu'un mauvais pressentiment m'envahit. A peine ai-je fini d'imaginer la scène, qu'elle se produit sous mes yeux : la sous-barbe bâbord lâche et le gennaker s'emballe à la proue de Seaview. Le choc est moins violent que la première fois (voir post Quand la sous barbe nous rase) car nous sommes passés de 25 à 15 noeuds mais quoiqu'il en soit, le gennaker se retrouve une fois encore à battre au vent.
Dans un calme assez déconcertant - c'est l'avantage d'avoir cassé une première fois, on s'aguerrit - Jules sort illico de sa micro-sieste et je demande aux filles de rentrer dans le carré en leur expliquant ce qu'il vient de se produire. Nous leur précisons que ce n'est pas grave, mais préférons qu'elles demeurent à l'intérieur le temps de la manoeuvre. Cette fois-ci, dix minutes suffisent pour "mettre en boîte" le gennaker dans l'un des coffres avant - bien fermé par les loquets - donc pas de risque que la sauvageon se fasse la malle. A postériori, cette deuxième déconvenue - au lieu de m'abattre - bizarrement me rassure. Je réalise que j'acquière davantage d'expérience - je m'exprime à la première personne car Jules a plusieurs (dizaines) années d'avance sur moi en matière de voile et de vents. A défaut de gennaker, nous continuons notre traversée sous solent. Le vent s'est calmé et demeure constant à 10 noeuds. Nous tentons une séance de Cned, vite avortée par nos estomacs malmenés. Camille est particulièrement malade mais retrouve sa jovialité dès lors qu'elle a piqué une tête dans l'un des sauts bleus - nos meilleurs alliés en cas de barbouillage.
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La nuit tombe, on s'organise pour les quarts et l'on s'installe dans le carré - plus facile à gérer et moins secoué - alors que Camille et Manon vont docilement se coucher. La journée de nav' semble les avoir achevées.
Je prends le premier quart et bien que les conditions soient optimales - 10 noeuds de vent à 90° toujours sous volet et GV, une houle bien installée - la tombée de la nuit est pour moi source d'appréhension.
On ne discerne ni horizon, ni vagues, ni bateaux de pêche, ni cargos. La nuit semble nous envelopper de son voile noir, impalpable mais pourtant pesant. Parfois, ce voile mue en chape nocturne et me donne la contrariante impression de subir la houle et le vent. Quand les vagues nous prennent de travers, Seaview gîte allègrement. Je me déplace genoux fléchis, comme Passe-Partout sur son rocher - pour gagner en stabilité et abaisser mon centre de gravité. Toutes les quarts d'heure, le minuteur de l'i-phone me rappelle à la vigie : je sors dans le cockpit et balaye l'horizon à 360°. J'hume l'air, sens le vent, entends les paquets de vagues déferler sur les coques. Si nécessaire, j'ajuste le solent et dresse l'inventaire de nos voisins, matérialisés par un triangle lumineux sur l'AIS. Une sorte de bataille navale du 21ème siècle. Puis, je retourne dans le carré écouter "la playlist des amis" qui, depuis le départ, nous accompagne dans nos veillées nocturnes. Lorsque la nuit est trop oppressante, je troque Feist, Angus & Juila Stone contre une musique tibétaine et j'improvise une séance de yoga. Rien de tels que les bols tibétains et des battements de diaphragme pour lâcher prise.
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Apaisée, je tente en vain sous pilote automatique de regarder un film mais mon estomac n'est toujours pas assez accroché. Vers 1h du matin, Jules prend la relève. Nothing to declare. Nous passons quelques minutes ensemble à contempler le ciel étoilé, comme des enfants. Une étoile filante éclipse le ciel profond - un clin d'oeil de notre bonne étoile. Jules barre courageusement jusqu'à 5h et me sors de mon sommeil intermittent avant le lever du soleil. Mon moment préféré, non seulement car la nature s'éveille mais aussi car on gagne en visibilité !
6h30, le soleil rogne l'horizon, le vent est toujours stable à 10 noeuds, la mer s'est apaisée, le ciel est dégagé. Pas un bateau à l'horizon, AIS et radar vierges de tout spécimen à voile ou moteur, un régal.
La deuxième journée sera assez "tranquille" mais ne nous permettra ni de bouquiner ou ni d'effectuer toute activité intellectuelle (exit le Cned) ou manuelle (exit les bracelets brésiliens, les colliers de perles et les scoubidous pour les filles…). Tous les quatre, nous sommes assez nauséens, la mer est encore très formée.
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Deuxième nuit, on permute les quarts. Jules accepte d'inverser les heures pour m'éviter trop de nav' nocturne. La météo prévoit une bascule Nord du vent dans la nuit. Peu avant minuit, le vent monte en rafales à 20 noeuds en l'espace de dix minutes, un grain assez violent s'abat sur nous. Jules assure, réajuste les voiles et maintient le bateau à vive allure. Entre les vagues et le bruit du grain sur le roof, on a l'impression de passer dans une machine à laver.
Puis, tout se calme. Le grain semble passé.
Une demie-heure plus tard, on est contraint de se dérouter pour laisser passer un cargo. Ces orques en ferraille peuvent atteindre 300 mètres de long et naviguer à 20/25 noeuds. Autant dire qu'à coté d'eux, Seaview est une crevette rose. Ces deux dernières heures, on réalise que le nom de ces navires frôlent parfois l'impertinence : Navios Serenity, Don Juan… On se demande ce que consomment les armateurs lorsqu'ils baptisent leurs navires! Quoiqu'il en soit, Don Juan ne se montrera pas plus gentleman que Navios Serenity - que son nom prédestine à rester serein, puisqu'il ne répond pas aux appels VHF. Nous en croiserons plusieurs qui se comporteront comme des sharks : il semblerait que faire la sourde oreille soit un bon moyen de ne pas avoir à se dérouter et contraigne l'autre à le faire.
Mon quart à partir de 2h du matin sera beaucoup plus paisible que celui de Jules. Quelques cargos à surveiller sur l'AIS. Je parviens même à ouvrir le mac et à dérusher les vidéos des jours précédents, casque sur les oreilles. La nuit, séquencée et finalement cadencée, me semblera étonnement courte.
Les filles émergent à 8h30 après avoir fait le tour du cadrant. Et comme souvent au petit jour, les dauphins viennent nous dire bonjour. Cette nav' est décidément le festival des dauphins. Jamais nous n'aurions pensé en voir autant en si peu de jours, nous sommes comblés.
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Troisième journée sous le soleil, à 8-10 noeuds, sous grand voile et solent. Coup de fil d'Eric, de l'équipage Catapulte (vive le téléphone satellite !), que nous devons retrouver avec sa femme et ses trois filles dans l'archipel de Madère. Partis de Gibraltar 24h plus tôt que nous, Catapulte est à 80 miles plus au sud. Rendez-vous est donné mercredi matin pour le petit dej'. Les filles se réjouissent de retrouver Anais, Audrey et Margot. Cinq semaines en quasi vase clos, nous mesurons leur impatience.
Quelques jeux de cartes et parties de scrabble plus tard, la mer est d'un bleu profond, les dauphins se donnent en spectacle et rivalisent d'acrobaties autour du bateau. L'ordinateur de bord indique une eau à 25 degrés. Sceptiques, nous nous empressons de remonter un sceau d'eau et d'en vérifier la température. 25 degrés, c'est 10 degrés de plus qu'en Galice : on rêve déjà au bain de mer à l'arrivée… Pour l'heure, c'est toilette de chat pour l'équipage, l'usage de la douche étant rendu très inconfortable par la houle de travers.
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Quatrième jour, Camille écoute des contes, Manon de la musique, la houle s'est aplatie, Seaview file à 8 noeuds, c'est fluide. On réouvre les cours du Cned et c'est parti pour quatre heures de cours!
Durant toute la navigation, Camille et Manon auront été exemplaires. Pas de crêpages de chignon comme si, lorsque nous sommes en grande nav', elle basculaient (in)consciemment en mode "calmes et obéissantes" - une sorte d'autorégulation. Jules se montre vraiment patient, constant dans ses humeurs et rassurant. Intuitivement, un pacte de bienveillance semble s'être mis en place entre nous quatre. Chacun est très à l'écoute de l'autre et de son bien-être. Les parents "bien-veillent" sur les enfants et vice-versa. Cette adaptation - aussi naturelle soit-elle - me fascine.
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L'appel des retrouvailles avec Catapulte nous conduira à doubler les voiles des moteurs et nous arriverons finalement avant la nuit. Porto Santo, volcanique, imposante et sauvage, nous accueille au coucher du soleil. L'équipage de Catapulte est là. Dans les jumelles, il nous fait de grands signes de bienvenue.
Epuisés… mais nous sommes a-rri-vés !
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Même si ces 4 jours/3 nuits de nav' nous ont lessivés, nous ne résistons pas aux retrouvailles le soir-même. A bord, c'est apéro-bateau pour les grands et jeux à gogo pour les enfants jusque tard dans la soirée. Un bonheur de retrouver des copains, une vie sociale et partager nos péripéties de traversée.

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Traversée de Cascais à l'archipel de Madère vue par Jules

Même constat que pour le Golfe de Gascogne : pour éviter de se prendre une dépression sur la tête avec 25/30 nds de vent dans la mauvaise direction, nous devions partir samedi au plus tard (voir le post «Prévoir une navigation »). A défaut, il aurait fallu patienter une semaine de plus à Cascais. La traversée étant la plus longue jamais faite (500 milles, soit 900 km), nous prenons l’option tranquille en partant en début de matinée, avec une arrivée prévue dans la nuit de mardi à mercredi. On prévoit donc 3 à 4 nuits en mer ; de quoi arriver bien fatigués. Quelques échanges SMS par satellite plus tard, RDV est pris avec Catapulte à Porto Santo (eux viennent de Gibraltar), une île de l’archipel de Madère, à quelques milles au Nord de l’île principale. Après les péripéties de l’attente des cours du CNED, tout se (re)met en place.

Au final, la traversée se sera très bien déroulée même si les nuits accumulées en mer se ressentent dans l’état général de l’équipage à l’arrivée (on est RINCE !).
Les conditions légères ont quand même mis à l’épreuve nos estomacs (surtout celui de Camille) et le gennaker nous a encore fait faux bond, la faute à un ridoir dont j’ai du faussé le filetage au montage/démontage. Mais cette fois-ci, pas de réelle casse, et on s’est contenté du solent pour cette traversée.
On se rend compte maintenant, qu’il faut attendre le 4ème jour en mer pour pouvoir lire sereinement (ou faire le CNED !). Eric de Catapulte nous conseille la veille de passer la nuit au mouillage (qui bouge toujours un peu), plutôt qu’au port. A essayer.
Les dauphins –ces fois-ci la plupart du temps tout gris, genre Flipper- nous ont accompagné plusieurs fois par jour et c’est toujours la fête à leur apparition. On a même eu droit à quelques sauts dignes des marineland.
La température de l’eau n’en finit pas de grimper à se demander si la sonde n’est pas faussée : on peut maintenant lire 25°c. !? Nous qui étions habitués au 16°c de la Gallice et du Portugal, reprenons espoir avec la perspective d’une vraie baignade sans combinaison à l’arrivée. De quoi remettre du baume au cœur à tout le monde après déjà 3 jours en mer.
Le dernier jour aura été plus calme que prévu et on s’est même appuyé du moteur pour arriver avant la nuit mardi: l’appel de l’apéro avec Catapulte a été plus fort que le traditionnel bol de pates chinoises prévu initialement…Bizarre.

Pendant cette traversée, point de bateaux de pêche (nous étions très au large), mais une multitude de cargos : on traverse en effet l’axe Nord-Sud (de Gibraltar vers l’Europe) et l’axe Est-Ouest (de Gibraltar vers l’Amérique). Le record est un cargo de 366mètres !

Mais comment fait-on pour les éviter ?

Règle numéro 1 : on scrute l’horizon et les points lumineux. Le hic avec les cargos, c’est leur vitesse : bien plus élevée que la nôtre. Donc le risque de mal estimer leur trajectoire par rapport à la nôtre existe.
Règle numéro 2 : on utilise en renfort l’AIS magique : un transpondeur à usage maritime, qui indique à tous les bateaux équipés –obligatoires pour les cargos- la position, le cap, la vitesse, la longueur et le nom du navire. La plupart des bateaux de plaisance en sont aussi équipés depuis quelques années. Ces informations sont reprises sur l’écran du traceur (en superposition de la carte électronique de la région). Ainsi, les cargos nous « voient » et nous les « voyons ». Dans la plupart des cas, nos routes ne se croisent pas : ils passent bien devant ou bien derrière. Mais parfois, on se retrouve en route de collision. Je cherche alors systématiquement à les contacter par la VHF (la radio) pour savoir si je passe « at your head » ou pas. Un seul sur trois a répondu : je les soupçonne de faire les sourds pour leur éviter de se dérouter. Bien sûr, au moindre doute, je change de trajectoire, même si en théorie, nous sommes prioritaires… On se sera donc dérouté 3 fois pendant cette traversée, et comme d'habitude, cela arrive toujours de nuit ; sinon ce serait trop facile.

Un exemple avec cette capture d’écran : au milieu, c’est Seaview. Le triangle qui vient vers nous est un autre bateau. Il est à 15milles (28km). En cliquant dessus, je m’aperçois qu’il va 3 fois plus vite que nous et qu’il fait 200mètres de long. A éviter donc.

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La traversée vers Madère en vidéo

Nav vers Madere from Jules et So on Vimeo.

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