Nav vers Cuba
La sortie de la baie de Samana s'avère houleuse, le vent de face et les pêcheurs locaux ne nous rendent pas la tâche facile. Les sauts bleus viennent à la rescousse de Camille et Manon qui ont du mal à se ré-amariner.
Une idée des vagues qui déferlent : ci-dessus, la même vue à 5 secondes d'écart…
Le Cap de Samana est de toute beauté, la nature ici semble dotée d'une force incroyable. Quand les filles reprennent leurs esprit, nous organisons une chasse à "l'oeuf" avec les moyens du bord - selon l'expression consacrée - car c'est aujourd'hui Pâques et l'on ne déroge pas aux traditions, même en pleine mer.
Les quarts de nuit s'organisent et s'avèrent bien paisibles, un vent de 15 à 20 noeuds nous accompagnera tout du long et nous resterons en contact VHF avec nos bateaux-copains.
Au troisième jour, alors que nous approchons des côtes cubaines à 60 miles au sud ouest de l'île, un hélico US Coastguard nous survole à très faible altitude - suffisamment bas pour qu'on aperçoive distinctement pilote et co-pilote. La scène a des airs de James Bond ! Une heure et demie plus tard, un navire militaire US Coastguard nous approche en nous questionnant par VHF (équipage, numéros de passeport, motif de notre voyage, transport de cargaison…). Après deux heures de cordial interrogatoire à distance, le garde-côte nous salue et nous souhaite bon vent. Etant dans les eaux cubaines, on imagine que l'intervention des Américains était liée à l'embargo ou à la proximité toute relative de Guantanamo située à l'extrémité sud-est de l'île.
Après trois nuits de navigation, nous rejoignons Mimosa et Siminoe dans la baie de Vita au levé du soleil. Les retrouvailles entre bateaux après quelques jours de nav sont toujours savoureuses.
Le parc Los Haitises
La joyeuse tribu formée par les trois équipages de Siminoe, Mimosa et Seaview évolue en annexe tantôt dans la mangrove tantôt dans les grottes fréquentés jusqu'au 16ème siècle par les indiens Tainos. Ici, la faune est abondante, nous croisons pélicans, vautours, colibris…
On visite aussi les grottes Cueva de la Linea et Cueva de Arena, habitées il y a 500 ans par les Amérindiens qui ont laissé plusieurs dessins rupestres représentant hérons, baleines, chamans, enfants… La légende raconte que la princesse Onaney, favorite du grand Chef Caonabo, se cacha dans cette grotte pour échapper aux Conquistadors.
Le parc de Los Haïtises, ce sont aussi des paysages de rizières et de montagnes à couper le souffle … Vous l'aurez compris, la République Dominicaine est une belle découverte !
La description enthousiaste qu'en faisait Christophe Colomb au 15ème siècle semble être toujours d'actualité : "L'Hispaniola est une merveille : les sierras et les montagnes, les plaines et les vallées, les terres si belles et grasses, bonnes pour planter et semer, pour l'élevage des troupeaux de toutes sortes…"
Mouillage Baie de San Lorenzo - Rép Dominicaine
Après avoir quitté la marina, direction la baie de San Lorenzo, au coeur du parc naturel. Plusieurs mouillages sont possibles puisque tous abrités de la houle. Nous avons choisi celui le plus au fond de la baie, devant un accès à la mangrove. Fond de sable/vase de 2/3m de très bonne tenue. On peut remonter dans la mangrove assez loin en annexe et la balade vaut le détour. On y retrouve les paysages de l'indien river (Dominique), mais on est seul au monde! En prenant à droite après l'entrée, une fois arrivé au bout, on peut aller déjeuner dans un éco lodge (15mn de marche) avec des piscines (presque) naturelles.
L'annexe permet aussi d'aller découvrir tranquillement de plus près les mogotes et leurs grottes.
Un mouillage coup de coeur même si la couleur de l'eau n'incite pas à la baignade.
Pour quitter la République Dominicaine, il faut remonter toute la baie de Samana, la plupart du temps contre le vent. Nous sommes ainsi partis le matin très tôt avant le renforcement du vent thermique qui peut rendre la navigation très pénible (vent dans l'axe de la baie). Une fois sorti de la baie, le calvaire n'est pas terminé puisque la mer, même avec 10nds de vent, est souvent très mauvaise tant que l'on n'a pas arrondi le cap de Samana.
Chutes de El Limon
Aujourd’hui, les 3 équipages S2M (Siminoe, Seaview et Mimosa – également rebaptisés « la tribu porte bonheur » car nous voyageons à 13) mettent le cap sur les chutes de El Limon, une fois n’est pas coutume, par la terre.
L’occasion de traverser quelques villages du nord de l’île et d’emprunter un bout de forêt tropicale. On y découvre des plantations de fruits de la passion et de cacao. La végétation est dense, sauvage, elle nous rappelle par endroit la Dominique.
Après 45 mn de marche, nous longeons une rivière qui débouche sur des chutes grandioses de 50 mètres de haut. Seul hic, 150 personnes accompagnées de leurs guides se retrouvent confinées au pied des chutes. Cela fait bien longtemps que nous n’avons pas été confrontés à une telle foule, de surcroît en pleine nature, il se pourrait bien que ces derniers mois nous aient rendus plus sauvages.
Demi-tour, on revient sur nos pas pour s’installer plus loin dans un écrin de verdure au pied d’une cascade moins imposante (10 mètres tout de même) mais tellement plus paisible. L’endroit se prête au pique-nique, à la baignade et même à la sieste.
En soirée, avitaillement à Las Terrenas, station balnéaire en pleine essor où les 4x4 font ronfler moteurs et enceintes et où condominiums et ressorts luxueux semblent sortir de terre comme des champignons. Le contraste avec les villages traversés quelques heures plus tôt est saisissant. En revanche, les longues plages de sable aux abords de Las Terrenas semblent avoir été relativement préservées de cette surenchère touristique.
Saint Domingue : sur les traces de Christophe Colomb
Deux journées consacrées à la visite de la vieille ville empreinte des vestiges du nouveau monde, datant du début du 16ème siècle. Sac au dos, nous marchons sur les traces de Christophe Colomb.
Si Saint Domingue apparait cacophonique au prime abord, la vieille ville dévoile ses charmes lorsqu'on prend le temps de se perdre dans ses ruelles.
On y découvre cours intérieures, patios et détails architecturaux - certes souvent perdus dans un embrouillamini de fils électriques - mais on comprend pourquoi la ville a été classée Patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco.
On y découvre la Cathédrale Santa Maria, première cathédrale des Amériques, construite de 1512 à 1540. C'est là que reposa de nombreuses années l'urne supposée contenir les restes de Christophe Colomb, avant d'être transférée à Séville.
La place principale de la vieille ville, Parque Colon, lui rend hommage avec une statue du navigateur pointant la terre du doigt.
Pour mieux comprendre l'époque des grandes découvertes, la conquête et la fondation d'Hispaniola (ancien nom donné à Saint-Domingue) on se dirige vers le musée de las Casas Reales, malheureusement assez décevant. Face à la grande carte murale retraçant les quatre voyages de C. Colomb en Amérique, Camille semble prendre réellement conscience de la distance réalisée par un tour de l'Atlantique et s'écrie : "On a quand même fait un bon bout de chemin !!!…" En effet, plus de 7000 milles parcourus, déjà.
Le musée présente également la reconstitution intéressante d'une pharmacie du 16ème siècle - forcément, on a une pensée pour à Kiki et Nath ! - et le bureau des gouverneurs, occupé jusqu'en 1961 par le dictateur Trujillo.
On enchainera sur l'Alcazar de Colon (construit pour le fils de Colomb, gouverneur d'Hispaniola. Voir photo ci-dessous. L'alcazar fut le siège de la couronne espagnole pendant de nombreuses années et vit passer les plus grands conquistadors.), le musée de l'ambre (assez didactique pour les enfants), la Calle El Conde (l'une des plus anciennes rues de la ville), le Fort Ozama (forteresse à l'entrée du fleuve) et les enceintes de la vieilles ville…
Après cela, une pause s'impose à la terrasse de notre charmant hôtel, situé au pied du Monastère de San Francisco,
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le premier monastère du nouveau monde (ci-dessous).
Au retour, on s'entasse dans un minibus bondé et après trois heures à travers campagne et villages dominicains, on retrouve Seaview que nous n'avions pas quitté pour une nuit à terre depuis cinq mois. Comme le temps file.
En régate à Samana
Notre ami Blaise, régatier semi-pro, a fini par nous convaincre de participer à la Spring Samana Regata organisée par la marina. On se retrouve à 13 sur Mimosa, l’outremer 45 de Valérie et Blaise, et l’on se prête tous au jeu de la régate, avec plus ou moins d’expertise selon les expériences de chacun.
Le dernier bord se fera au coude à coude avec un trimaran. On ne lâche rien, notre skipper demeure ultra concentré, l’équipage tente de le rester et les enfants – assis sur la coque au vent - se révèlent excellents supporteurs. Ils improvisent une chanson et entonnent à tue-tête :
«Ils sont bien marrants sur leur trimaran, mais en catamaran, on finira devant ! … Ils sont bien marrants sur leur trimaran, mais sur Mimosa, on les dépassera !».
Nous ne parviendrons pas à les devancer mais peu importe, quel chouette moment partagé.
A l’arrivée, photocall, paella conviviale et concert jusque tard dans la nuit. Un grand Merci les amis !
Marina Puerto de Bahia - Rép Dominicaine
Marina luxueuse située dans la baie de Samana, à 13 milles de la première bouée du chenal d'entrée dans la baie.
Le personnel est aux petits soins et vous aidera à vous amarrer, ce qui peut être un peu périlleux en fonction de la place qu'ils vous attribuent. On apprécie d'autant plus que les quais sont en béton sans aucune protection. Le ressac peut être parfois important le long des quais: les amarres souffrent (mais moins qu'à Mindelo ou Madère).
Les formalités d'immigration et de douane se font directement dans les bureaux de la marina et tout se fait dans une attitude assez décontractée.
La marina se trouve dans un immense complexe avec un hôtel et des villas haut de gamme (résidences secondaires de très riches dominicains), mais tout est assez discret dans le paysage, et en dehors de la semaine de Pâques c'est assez calme. L'accès est très sécurisé.
En restant dans la marina, vous avez accès à 2 très belles piscines et même une salle de sport !?
Wifi très correct en dehors des heures pleines. Mini supérette aux tarifs raisonnables dans l'enceinte de la marina. Pour un ravitaillement complet, on trouve tout à Las Terrenas (30km, à faire lors d'une excursion à la chute d'eau El Limon) dans un grand supermarché qui propose plein de produits français à des prix défiant toute concurrence (bien moins cher qu'aux antilles françaises!).
Location de voiture aussi depuis la marina. Pour aller à Saint-Domingue, de nombreux cars passent à l'extérieur du complexe et relient la capitale en 2/3h.
Nav vers la République Dominicaine
Que cette nav' était belle, qu'elle était calme. Les nuits en mer ont même été plus paisibles que certaines nuits dans les mouillages agités de St Barth et des îles vierges.
10-12 noeuds en moyenne avec une accélération les derrières heures à 15 noeuds entre Puerto Rico et la République Dominicaine.
Les quarts de nuits sont un délice. Camille et Manon se proposent d'assurer les quarts de 20 à 22h (le vent à 8-9 noeuds). Même si l'on veille à distance, elles assureront comme des chefs. La mer est étonnement plate, le ciel étoilé, on passe nos quarts à contempler les étoiles et à écouter de la musique.
Les visites de contrôle dans les cales moteurs en pleine mer sont toujours un moment que j'appréhende un peu. Je préfère largement y aller que voir Jules s'engouffrer sous les jupes du bateau. Malheureusement, mes compétences techniques ne me prédisposent pas à ce poste, je regretterai presque d'avoir "séché" la formation moteur.
En arrivant dans la baie de Samana, on fait l'école buissonnière pour se consacrer à l'observation des baleines. Cette baie offre l'une des plus importantes concentration de baleines à bosse au monde. Chaque année, environ un millier d'entre elles viennent profiter des eaux chaudes et préservées de la baie pour se reproduire et mettre bas. La "baleine jubartes" (baleine à bosse) mesure en moyenne 12 à 15 mètres de long et pèse la bagatelle de 40 à 60 tonnes. Il semblerait que ce soit l'une des espèces de baleines les plus joueuses. Pour séduire, les mâles sont capables d'effectuer des sauts impressionnants et poussent la chansonnette - mélodie qui peut être captée par une baleine à une distance de 20 km.
Les baleines à bosse ont - comme nous - le goût du voyage. Elles parcourent 2000 km depuis les côtes de Nouvelle-Angleterre et plus de 5000 km depuis le Groenland ou l'Islande. L'utilisation des filets de pêche industriels est d'ailleurs un désastre durant les migrations. Non seulement, les filets tuent les dauphins mais aussi les baleineaux, obligés de nager plus près de la surface, du fait de leurs poumons moins volumineux. Autre méfait de l'homme qui menace à terme l'espèce : le réchauffement climatique, qui diminue de manière conséquente la quantité de krill et forcent les baleines à voyager de plus en plus loin pour se nourrir, entrainant leur mort par épuisement.
Quand aux baleineaux qui naissent dans la baie, ils ingurgitent quotidiennement près de 180 litres de lait de leur mère et grossissent de 45kg par jour !
Janvier-février et mars constitue la période la plus propice pour observer les mammifères dans la baie. Nous profitons donc du départ des baleines qui attendent que leurs petits soient suffisamment costauds pour quitter Samana et s'élancer vers des contrées lointaines.
Pour percevoir des baleines, il faut s'armer d'une petite dose de patience (elles peuvent rester jusqu'à 40 minutes sous l'eau) mais très vite, nous sommes accueillis par une puis deux puis trois baleines qui font danser leur queue. Le ballet durera quelques minutes pour l'une, un spectacle aussi impressionnant qu'émouvant. A bord, c'est l'euphorie, mais nous restons à distance, par précaution.
> Pour la famille et les proches, voir la vidéo de la traversée vers la République Dominicaine dans l'onglet vidéos.